La liquidation d’une Société Civile Immobilière (SCI) entraîne sa disparition juridique, avec des conséquences précises sur la répartition de ses actifs. Lorsque la SCI possédait un bien immobilier au moment de sa dissolution, la question de sa transmission aux associés ou à des tiers devient centrale. Cette étape ne peut être improvisée : elle est strictement encadrée par le droit des sociétés et le droit fiscal français. Voici ce qu’il faut savoir.
Que devient un bien immobilier après la liquidation d’une SCI ?
La liquidation d’une SCI suppose d’abord la réalisation de l’actif et l’apurement du passif. Cela signifie que le liquidateur désigné doit vendre les actifs (le bien immobilier notamment) et rembourser les dettes de la société. Une fois cette phase achevée, il dresse les comptes de liquidation, établit un solde définitif, et ce solde est réparti entre les associés sous forme de boni de liquidation ou, dans certains cas, de transfert de propriété.
Lorsque le bien immobilier n’a pas été vendu avant la clôture de la liquidation, il peut être attribué en nature à un ou plusieurs associés. Cette répartition du patrimoine social sous forme de transmission en nature implique un acte juridique spécifique : il ne s’agit pas d’une vente mais d’un partage.
Comment transmettre un bien immobilier après la liquidation de la SCI ?
Deux grandes options s’offrent aux associés ou à leurs héritiers : l’attribution du bien immobilier entre associés (en indivision ou en pleine propriété) ou sa transmission à un tiers (vente ou donation après liquidation). Chacune de ces options implique des formalités précises.
1. Attribution du bien immobilier entre les associés
Lorsque le bien immobilier n’a pas été cédé pendant la liquidation, il peut être partagé entre les associés. Cette attribution doit faire l’objet d’un acte de partage notarié, car la mutation porte sur un immeuble. Le notaire dresse un état descriptif du bien et fixe la quote-part attribuée à chaque associé.
Cette attribution en nature constitue un partage de patrimoine, et non une vente. Néanmoins, elle donne lieu à la perception de droits fiscaux spécifiques.
L’acte doit ensuite être publié au service de la publicité foncière (anciennement conservation des hypothèques), ce qui officialise la transmission du bien immobilier aux noms des associés.
2. Vente du bien à un tiers et répartition du produit
Dans ce scénario, le bien est vendu avant la clôture de la liquidation. Le produit de la vente est ensuite partagé entre les associés selon leur part dans le capital social. C’est la solution la plus simple sur le plan administratif, car elle évite les formalités liées à la transmission immobilière.
En revanche, elle peut engendrer une plus-value imposable, avec une fiscalité plus lourde en cas de forte valorisation du bien au fil du temps.
3. Transmission par succession ou donation après liquidation
Si l’un des associés souhaite donner ou transmettre à ses héritiers la part du bien immobilier qu’il a reçue après la liquidation, il le fait selon le régime classique de la transmission du patrimoine. Cette transmission peut se faire par donation ou par succession.
Dans tous les cas, cela suppose une mutation à titre gratuit, qui déclenche des droits de donation ou de succession calculés selon le lien de parenté entre le donateur et le bénéficiaire. L’évaluation du bien est essentielle pour établir l’assiette des droits.
Quelles sont les démarches pour formaliser la transmission du bien ?
La transmission d’un bien immobilier post-liquidation nécessite plusieurs démarches juridiques et fiscales :
- Rédaction de l’acte de partage notarié si le bien est attribué en nature aux associés.
- Enregistrement de l’acte auprès du service des impôts des entreprises (SIE) compétent.
- Publication de la transmission au service de la publicité foncière, pour officialiser le changement de propriétaire.
- En cas de vente, signature d’un acte authentique de vente chez le notaire et répartition du prix de cession.
- En cas de donation, déclaration et paiement des droits de mutation au service fiscal compétent.
Quel est le régime fiscal applicable à la transmission du bien ?
Le régime fiscal varie selon la forme de transmission retenue. Voici les principaux cas de figure.
Attribution en nature entre associés
L’attribution en nature d’un bien immobilier lors du partage post-liquidation est soumise au droit de partage fixé à 2,5 % de la valeur du bien attribué (article 746 du Code général des impôts – CGI). Ce droit est calculé sur la valeur réelle du bien au jour du partage.
Attention : Si le partage est inégal (par exemple, un associé reçoit un bien d’une valeur supérieure à sa part dans le capital), une soulte (somme d’argent) est due, ce qui peut engendrer un coût fiscal supplémentaire.
Vente du bien et imposition de la plus-value
Si la SCI vend l’immeuble avant sa liquidation, la plus-value immobilière réalisée est soumise :
- à l’impôt sur les sociétés (IS) si la SCI est imposée à l’IS ;
- ou à l’impôt sur le revenu (IR) dans le cas d’une SCI translucide, selon le régime des plus-values des particuliers (articles 150 U à 150 VH du CGI), avec des exonérations ou abattements pour durée de détention.
Les associés seront ensuite imposés sur leur quote-part du boni de liquidation, à hauteur de leur participation dans la société.
Transmission à titre gratuit (donation ou succession)
Dans ce cas, les droits de mutation à titre gratuit s’appliquent selon le lien entre le donateur et le bénéficiaire, après application des abattements en vigueur (article 779 du CGI). La valeur du bien transmis sert de base à la taxation, éventuellement ajustée selon les dettes ou soultes.
Tableau récapitulatif des modes de transmission et de leur fiscalité
Mode de transmission | Formalités principales | Fiscalité applicable |
Attribution en nature entre associés | Acte notarié + publication foncière | Droit de partage (2,5 % de la valeur) |
Vente du bien immobilier | Vente notariée avant liquidation | Plus-value immobilière + IR/IS sur le boni |
Donation de la part reçue post-liquidation | Acte notarié + déclaration de donation | Droits de donation (barème selon lien) |
Transmission par succession | Déclaration de succession + notaire | Droits de succession (abattement selon lien) |
La transmission d’un bien immobilier après la liquidation d’une SCI est une opération techniquement complexe, qui combine droit des sociétés, droit immobilier et fiscalité. Que le bien soit attribué en nature, vendu ou transmis à titre gratuit, les associés doivent impérativement se faire accompagner par un notaire et parfois un expert fiscal pour optimiser les démarches et limiter la charge fiscale.
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