Largement plébiscitée pour la facilité de gestion, de détention et de transmission d’un patrimoine immobilier qu’elle permet, la SCI peut parfois se retrouver sans activité pendant une période plus ou moins longue. Quelles sont les conséquences d’une telle situation ? Que prévoit le droit français en cas d’inactivité prolongée ? On fait le point.
Qu’est-ce qu’une SCI et quel est son objet social ?
La SCI (société civile immobilière) est une société civile constituée en vertu des articles 1832 et suivants du Code civil. Elle a pour objet principal la gestion d’un patrimoine immobilier, qu’il s’agisse d’acheter, de construire, de gérer ou de mettre en location des biens immobiliers.
Attention : Contrairement aux sociétés commerciales, la SCI ne peut exercer d’activité commerciale par nature, sauf à risquer un redressement fiscal ou une requalification.
L’objet social est inscrit dans les statuts de la société et détermine le cadre légal dans lequel les associés peuvent agir. Il peut s’agir, par exemple, de « l’acquisition, la détention, la gestion et la location de biens immobiliers ». Toute activité exercée en dehors de cet objet social est en principe nulle ou susceptible de sanctions.
Qu’entend-on par “SCI sans activité” ?
Une SCI sans activité désigne une société civile immobilière qui, de fait, n’exerce plus l’activité prévue dans son objet social. Cela peut résulter de plusieurs situations : un bien vendu sans être remplacé, l’absence de location ou d’administration de patrimoine immobilier, ou encore l’abandon du projet initial sans dissolution de la société.
Il est important de distinguer deux cas de figure :
- La SCI a temporairement cessé d’exploiter un bien mais conserve l’intention de poursuivre son activité.
- La SCI ne détient plus aucun actif immobilier, n’a plus d’opérations comptables ni de projets immobiliers à court ou moyen terme.
C’est principalement ce second cas qui peut poser des problèmes juridiques et fiscaux.
Que prévoit la loi en cas d’inactivité d’une SCI ?
L’obligation d’une activité réelle et conforme à l’objet social
Le droit français n’impose pas qu’une société soit toujours active au sens commercial du terme. En revanche, une SCI qui ne respecte plus son objet social ou qui reste inactive durablement peut faire l’objet de procédures spécifiques. L’article 1844-7 du Code civil précise les cas de dissolution d’une société, et notamment celui de la cessation d’activité réelle.
Ainsi, une SCI sans bien immobilier, sans revenus, sans projets ni gestion active de patrimoine est exposée à une dissolution judiciaire pour défaut de cause ou non-respect de son objet social.
De son côté, également, la jurisprudence considère qu’une société qui reste inactive sur une longue période sans perspectives crédibles de reprise peut être dissoute, même si ses statuts ne prévoient pas une durée limitée de fonctionnement.
Le risque de radiation d’office du RCS
Une SCI sans activité est également susceptible d’être radiée d’office du registre du commerce et des sociétés (RCS). En effet, l’article R. 123-136 du Code de commerce permet au greffe du tribunal de commerce de procéder à une radiation si une société n’a plus d’activité avérée, notamment si elle n’a pas déposé de comptes annuels ou si elle est restée sans objet depuis plus de deux ans.
Cette procédure administrative peut être déclenchée :
- Soit à l’initiative du greffe,
- Soit après une décision du juge consulaire.
A savoir : Une SCI radiée perd la personnalité morale, même si elle n’a pas été formellement dissoute par ses associés.
L’obligation de dépôt des comptes et déclaration fiscale
Même sans activité, une SCI reste soumise à certaines obligations déclaratives et comptables. Elle doit, notamment :
- Déposer une liasse fiscale (n°2072 pour les SCI à l’IR) chaque année auprès de l’administration fiscale, même en l’absence de recettes ou de charges.
- Tenir une comptabilité de trésorerie minimale, reflétant les opérations bancaires et patrimoniales.
- Organiser une assemblée générale annuelle pour approuver les comptes.
Le non-respect de ces obligations peut entraîner des sanctions fiscales (amendes) et servir de fondement pour démontrer l’inactivité ou l’abandon de gestion.
Dissolution volontaire de la SCI inactive
Si les associés constatent que la SCI n’a plus de raison d’être — par exemple après la vente de son unique bien immobilier —, la solution la plus conforme au droit est de prononcer sa dissolution volontaire anticipée.
Cette procédure est encadrée par l’article 1844-5 du Code civil. Elle implique une décision unanime (ou à la majorité prévue par les statuts), la nomination d’un liquidateur, la réalisation d’un bilan de liquidation, et le dépôt d’un dossier au greffe pour radiation.
En cas de boni de liquidation, celui-ci sera imposé selon le régime applicable aux associés (impôt sur le revenu ou sur les sociétés).
Tableau récapitulatif : que risque une SCI inactive ?
Situation constatée | Conséquence juridique principale | Référence juridique |
SCI sans activité mais toujours titulaire d’un bien | Maintien possible si l’objet social est toujours valable | — |
SCI sans activité ni bien, sans projet | Risque de dissolution judiciaire ou radiation d’office | Article 1844-7 Code civil / R.123-136 C. com |
Non-dépôt des comptes ou déclaration fiscale | Amendes fiscales, suspicion d’abandon | CGI et BOFiP |
Absence totale d’opérations ou de gestion | Risque de requalification en société fictive | Jurisprudence sur l’article 1844-7 |
Dissolution volontaire par les associés | Procédure simplifiée de liquidation puis radiation au RCS | Article 1844-5 Code civil |
Une SCI peut rester en sommeil temporairement, mais l’inactivité prolongée sans gestion effective ou projet immobilier constitue un motif de dissolution, volontaire ou judiciaire. Les associés doivent rester vigilants et respecter leurs obligations formelles, même en l’absence de recettes ou d’opérations. En cas de doute, il est recommandé de consulter un professionnel du droit ou un expert-comptable pour éviter les risques de contentieux ou de sanctions.
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